
Morphologiquement, les faux-bourdons sont plus grands et plus trapus que les ouvrières, mais leur abdomen est plus court que celui de la reine. Ils ont de grands yeux qui se rejoignent presque au sommet de leur tête. Ses yeux sont adaptés pour repérer une reine en vol nuptial.
Contrairement aux ouvrières, ils n’ont pas de dard et ne participent pas à la défense de la ruche. Leur rôle dans la colonie est la fécondation des reines ; ils fécondent une jeune reine provenant des colonies plus ou moins proches lors du vol nuptial. Ils ont une durée de vie courte et saisonnière. En effet, les mâles ne vivent que quelques semaines et sont souvent expulsés des colonies en fin de saison.
Ils participent à des « congrégations de mâles » en plein air où ils attendent les reines vierges. Ces congrégations se forment principalement au printemps et en été, lorsque les jeunes reines émergent pour se reproduire. Il meurt immédiatement après l’accouplement, car son appareil reproducteur reste attaché à la reine.
Contrairement aux ouvrières, ils ne collectent ni nectar ni pollen, et ne participent pas à l’entretien de la ruche, leur rôle est la fécondation des reines vierges. Les faux-bourdons dépendent des ouvrières pour se nourrir. Ils consomment le nectar et le miel stockés dans la colonie.
En période de reproduction, ils sont acceptés dans toutes les colonies, même si ce n’est pas la colonie qui les a vu naître.
De plus, biologiquement, les faux-bourdons ne possèdent pas de glandes à cire, pas de glandes pour produire de la gelée royale, et pas de structures pour récolter le pollen (comme les corbeilles à pollen). Leur physiologie est entièrement orientée vers la reproduction.
Histoire et génétique
Génétiquement, les faux-bourdons naissent à partir d’œufs non fécondés, grâce à un mécanisme appelé parthénogenèse. Cela signifie qu’ils n’ont qu’un seul ensemble de chromosomes (haploïdes).
Ils émergent du couvain environ 24 jours après la ponte. Leur espérance de vie est d’environ 1 à 2 mois, mais ils sont souvent expulsés de la ruche avant l’hiver, car ils deviennent inutiles pour la colonie lorsque la reproduction n’est plus d’actualité.
La reine ne pond pas de mâles en hiver. Les faux-bourdons apparaissent principalement au printemps et en été, lorsque les colonies se préparent à essaimer ou à renouveler une reine.
À l’approche de l’automne, les ouvrières arrêtent de les nourrir et les chassent de la ruche pour économiser les ressources durant l’hiver.
Fait intéressant, même si leur rôle semble limité, les faux-bourdons contribuent à la diversité génétique des colonies d’abeilles. Une reine peut s’accoupler avec plusieurs mâles (en moyenne 15) pour assurer un mélange génétique optimal dans la colonie. Les faux-bourdons sont donc essentiels pour la survie à long terme des abeilles, bien qu’ils soient souvent mal compris ou sous-estimés.
Historiquement, la découverte que les abeilles ouvrières sont des femelles et non des mâles a marqué un tournant dans notre compréhension de la biologie des abeilles. Cette compréhension a évolué au fil des siècles grâce à des observations et des avancées scientifiques.
Durant l’antiquité les hommes pensaient que les ouvrières étaient des mâles. Les premiers naturalistes, comme le philosophe grec Aristote (IVe siècle av. J.-C.), pensaient que les ouvrières étaient des mâles et que la reine était un « roi ». Cela s’expliquait par une conception limitée des rôles sexuels chez les insectes.
Le rôle de reproduction des reines et la structure sociale des abeilles étaient encore très mal compris.
A la Renaissance on voit apparaître les premières remises en question. Au XVIe siècle, certains naturalistes, comme Charles Butler (auteur de The Feminine Monarchie, 1609), ont commencé à soupçonner que la « reine » était une femelle, en observant son rôle central dans la ponte des œufs. Cependant, l’idée que les ouvrières pouvaient également être des femelles n’était pas encore bien établie. Leur incapacité à se reproduire directement les faisait considérer comme des individus neutres ou mâles.
Les observations se font de plus en plus précises, au XVIIe siècle, Jan Swammerdam, un naturaliste néerlandais, est considéré comme un pionnier dans l’étude des abeilles. En 1673, grâce à des dissections minutieuses et l’utilisation d’un microscope rudimentaire, il a démontré que : la « reine » était bien une femelle et non un roi. Les ouvrières possédaient des organes sexuels atrophiés, prouvant qu’elles étaient aussi des femelles. Ce fut une révélation importante, car cela remettait en question les idées préconçues sur la biologie des abeilles.
La confirmation scientifique arrive au XVIIIe siècle, le naturaliste français René-Antoine Ferchault de Réaumur (1683-1757) a poursuivi ces travaux en étudiant la structure sociale des abeilles. Il a confirmé que : les ouvrières sont des femelles stériles. Leur rôle est distinct de celui de la reine (reproduction) et des mâles (fécondation).
Les connaissances actuelles découlent de la compréhension de la parthénogenèse au XIXe siècle, par Johann Dzierzon en 1845. Cet apiculteur allemand, a découvert que les faux-bourdons naissent à partir d’œufs non fécondés, un processus appelé parthénogenèse.
Cela a clarifié le rôle génétique des mâles, des ouvrières et des reines, établissant une compréhension complète de la hiérarchie sociale et reproductive des abeilles. La compréhension que les ouvrières sont des femelles a nécessité plusieurs siècles de recherches, d’observations et de remise en question des idées établies.
Cette découverte a non seulement éclairé le fonctionnement des colonies d’abeilles, mais elle a également marqué un progrès dans la biologie reproductive et l’étude des insectes sociaux.

D’autres espèces d’insectes ont aussi des mâles haploïdes
Des mâles qui ne participent qu’à la fécondation.
Plusieurs autres espèces d’insectes sociaux ou d’animaux présentent des mâles ayant des comportements similaires à ceux des faux-bourdons (mâles d’abeilles), c’est-à-dire un rôle principalement axé sur la reproduction et une absence de contribution aux tâches de la colonie ou de la communauté.
Chez les abeilles sans dard (Meliponini), les mâles jouent également un rôle strictement reproducteur. Ils ne travaillent pas dans la colonie et attendent de s’accoupler avec une reine. Une fois leur rôle accompli, ils meurent ou sont expulsés.
Dans les colonies de guêpes sociales (comme les guêpes communes, Vespidae), les mâles naissent généralement à la fin de la saison. Leur unique rôle est de s’accoupler avec les nouvelles reines. Comme les faux-bourdons, ils ne participent pas à la construction du nid, à la recherche de nourriture, ou à la défense de la colonie. Une fois leur rôle accompli, ils meurent ou sont chassés de la colonie avant l’hiver.
Chez les bourdons (Bombus sp.), les mâles sont également produits en fin de saison. Leur rôle principal est de féconder les jeunes reines. Après l’accouplement, les mâles ne retournent pas au nid et vivent de manière indépendante, se nourrissant de nectar. Comme les faux-bourdons, ils ne participent ni à l’entretien du nid ni à la collecte de nourriture.
Dans des groupes d’hyménoptères, plus éloignés des abeilles à miel, on trouve : les fourmis (Formicidae). Chez de nombreuses espèces de fourmis, les mâles (appelés « princes » ou mâles ailés) ont une fonction similaire.
Ils naissent spécifiquement pour participer à des vols nuptiaux, où ils s’accouplent avec des jeunes reines. Après l’accouplement, ils meurent rapidement, souvent dans les heures ou jours qui suivent. Comme chez les abeilles, les mâles ne participent pas à la défense, au soin des larves ou à la construction du nid.
Encore plus loin d’un point de vue systématique, les termites (Isoptères), les mâles ont un rôle reproducteur comparable, bien que leur comportement diffère légèrement. Après l’accouplement, le mâle (roi termite) reste dans la colonie pour féconder continuellement la reine. Cependant, il ne participe pas non plus directement aux tâches de la colonie, qui sont effectuées par les ouvriers et les soldats.

Les points communs chez ces espèces sont les suivants :
- Le rôle des mâles est limité. Les mâles ont généralement un rôle reproducteur exclusif. Les mâles sont dépendants.
- Ils dépendent souvent des ouvrières pour leur nourriture et leur survie jusqu’à leur maturité sexuelle.
- Les mâles sont éphémères. Une fois leur rôle reproducteur accompli, ils meurent rapidement ou sont exclus de la colonie.
- Les mâles ne sont pas pondus tout au long de l’année. Les mâles sont souvent produits à des moments spécifiques, en fonction des besoins reproductifs de la colonie, de façon saisonnière. Cette spécialisation s’explique par l’économie d’énergie et de ressources dans les colonies sociales.
- En limitant les tâches des mâles à la reproduction, les colonies optimisent leur fonctionnement en réservant les autres rôles aux ouvrières, qui sont plus nombreuses et stériles.
Ce modèle est une adaptation efficace dans de nombreux systèmes sociaux d’insectes !
La congrégation de mâles
Les congrégations de mâles chez les insectes sociaux, notamment chez les abeilles, sont des rassemblements où les mâles se regroupent pour tenter de s’accoupler avec des femelles. Ce comportement est particulièrement bien documenté chez les abeilles, mais il existe également chez d’autres espèces.
Les mâles, appelés faux-bourdons, se rassemblent dans des zones spécifiques appelées « congrégations de mâles ». Ces zones peuvent se situer à plusieurs mètres ou kilomètres de leur ruche d’origine. Ces zones sont souvent utilisées année après année, suggérant une composante géographique stable.
Les congrégations sont souvent situées dans des espaces dégagés, comme des clairières, des bords de champs ou des endroits avec des repères visuels distincts. On ne sait pas bien comment, d’une année sur l’autre, les jeunes reines et les faux-bourdons se regroupent au même endroit. Mais on sait que les faux-bourdons utilisent des indices visuels et des phéromones pour localiser ces zones et tant qu’ils ne meurent pas en fécondant une reine, ils s’y retrouvent les après-midis, par beau temps, pendant la saison de reproduction.
Les jeunes reines en vol nuptial émettent également des phéromones sexuelles, qui attirent les mâles dans les congrégations. Les mâles volent en cercle ou en essaim au sein de la congrégation, à des altitudes variables (généralement entre 5 et 40 mètres). Lorsqu’une reine vierge entre dans la congrégation, les mâles la poursuivent en essayant de s’accoupler. Les congrégations de mâles sont une stratégie évolutive qui maximise les chances de rencontre entre les mâles et les femelles prêtes à se reproduire.
Les facteurs influençant leur formation incluent la sélection sexuelle : les mâles les plus rapides ou les mieux adaptés à la poursuite ont plus de chances de transmettre leurs gènes. Et chez les femelles, les phéromones sexuelles attirent les mâles à des endroits stratégiques.
Une fois qu’un mâle s’accouple avec une reine, il meurt immédiatement après, car son appareil reproducteur reste attaché à la reine (ce qui est unique aux abeilles).
Une reine peut s’accoupler avec 10 à 20 mâles au cours d’un seul vol nuptial, stockant leur sperme pour le reste de sa vie dans un organe appelé la spermathèque. Les congrégations de mâles jouent un rôle essentiel dans la diversité génétique : Une reine qui s’accouple avec plusieurs mâles garantit une meilleure variabilité génétique au sein de la colonie.
La sélection naturelle : seuls les mâles les plus rapides ou les plus résistants réussissent à se reproduire, renforçant les traits bénéfiques dans la population.
Les congrégations de mâles sont un phénomène fascinant qui illustre l’efficacité des stratégies reproductives dans le règne animal, et elles sont essentielles pour le maintien des populations d’insectes sociaux.
Les congrégations de mâles ne se limitent pas aux abeilles. On les observe également chez les bourdons. Des mâles se regroupent dans des clairières pour attendre les jeunes reines. On en observe aussi chez les moustiques. Les mâles forment des essaims près de l’eau ou de repères visuels, attendant les femelles pour s’accoupler. Mais aussi chez les papillons, certaines espèces forment des congrégations pour courtiser les femelles. Bien que ce ne soit pas un insecte, certaines espèces de chauves-souris mâles forment des groupes dans des zones spécifiques pour attirer les femelles.
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