L’abeille noire, ou Apis mellifera mellifera, est une sous-espèce de l’abeille à miel occidentale particulièrement adaptée aux climats froids de l’Europe du Nord et de l’Ouest. Connue pour sa couleur sombre et sa résilience, cette abeille joue un rôle crucial dans l’écosystème en tant que pollinisateur. Cependant, elle fait face à de nombreuses menaces, notamment la perte d’habitat et l’hybridation. Cet article explore l’identification, le comportement, l’habitat et les efforts de conservation nécessaires pour protéger cette sous-espèce unique.

L’abeille Noire (Apis Mellifera Mellifera) : Identification, Comportement et Conservation

Identification et Morphologie

L’abeille noire, connue scientifiquement sous le nom d’Apis mellifera mellifera, est une sous-espèce de l’abeille à miel occidentale (Apis mellifera). On peut identifier une sous-espèce grâce à des critères physiques, comme la morphologie ou le comportement et aussi grâce à son aire de répartition.

Apis mellifera mellifera est généralement de couleur plus foncée que les autres sous-espèces de l’abeille à miel occidentale, apparaissant souvent presque noire d’où son nom vernaculaire. Les abeilles noires ont tendance à avoir plus de poils sur le thorax, ce qui peut leur donner un aspect duveteux. Les abeilles noires sont légèrement plus petites que certaines autres sous-espèces, avec un corps plus robuste.

Comportement et Habitat

Ces abeilles sont connues pour être plus défensives et moins dociles que d’autres sous-espèces d’abeilles mellifères comme l’abeille italienne (Apis mellifera ligustica). Elles peuvent être plus sujettes à piquer lorsqu’elles sont dérangées. Je trouve, personnellement, qu’elles semblent plus vouloir partir en vagues se cacher dans la partie la plus sombre de la ruche, et que ce sont surtout les colonies hybrides qui sont plus agressives.

Ces abeilles sont des butineuses efficaces et sont connues pour voler dans des températures plus fraîches et dans des conditions météorologiques moins favorables que les autres sous-espèces d’abeilles mellifères, comme par exemple des conditions très venteuses trouvées parfois sur les îles atlantiques.

Elles ont une forte tendance à essaimer, ce qui est une méthode naturelle de reproduction des colonies, mais peut être problématique pour les apiculteurs qui tentent d’entretenir leurs ruches. Apis mellifera mellifera présente, dans son milieu naturel, un degré élevé de résistance à certaines maladies et parasites, probablement en raison de sa longue adaptation à son environnement d’origine. Elle est cependant sensible à la loque européenne en début de saison.

Distribution et Conservation

L’aire de répartition native d’Apis mellifera mellifera est l’Europe du Nord et de l’Ouest, en particulier dans des régions comme les îles britanniques, la Scandinavie et certaines parties de la France et de l’Allemagne. Elles sont bien adaptées aux climats plus froids et ont développé des comportements qui les aident à survivre aux hivers rigoureux, comme former des grappes serrées pour conserver la chaleur et être économes avec leurs réserves de miel. On retrouve cependant des abeilles noires dans certaines îles des caraïbes, elles y ont été apportées par les colons européens.

La science ayant évolué, on a d’autres critères que la morphologie ou le comportement pour identifier les sous-espèces d’abeilles à miel : on peut identifier l’abeille noire grâce à des marqueurs génétiques. L’ADN mitochondrial de l’abeille noire est différent de celui des autres sous-espèces d’abeille. En effet, Apis mellifera mellifera appartient à la lignée M des abeilles mellifères, qui se distingue des autres lignées telles que la lignée C (par exemple, Apis mellifera ligustica, l’abeille italienne) et la lignée A (sous-espèce africaine). Des études ont identifié des marqueurs génétiques spécifiques qui distinguent Apis mellifera mellifera des autres sous-espèces. Ces marqueurs sont utilisés dans les tests génétiques pour vérifier la pureté des populations d’abeilles noires. Les marqueurs d’ADN microsatellites et l’analyse de l’ADN mitochondrial (ADNmt) sont couramment utilisés pour étudier la diversité génétique et la lignée.

Une surveillance génétique régulière est effectuée dans le cadre des programmes de conservation pour garantir que les populations d’Apis mellifera mellifera restent pures et exemptes d’hybridation significative. Des techniques, telles que le séquençage génomique et les marqueurs moléculaires sont utilisées pour suivre les changements génétiques au fil du temps.

Comment et pourquoi conserver l’abeille noire ? Quelles sont les menaces qui planent sur l’abeille noire ? Mais surtout, quelles sont les solutions pour pallier la disparition de l’abeille noire ?

Efforts de Conservation

De gros efforts de conservation ont été entrepris, car, comme toute sous-espèces elle peut s’hybrider. Notre abeille noire peut s’hybrider avec toutes les autres sous-espèces d’abeille à miel, et, si on souhaite la conserver il faut l’isoler des autres.

La pureté génétique d’Apis mellifera mellifera suscite de vives inquiétudes, car le croisement avec d’autres sous-espèces et hybrides d’abeilles mellifères a conduit à une dilution de leurs caractéristiques uniques. Divers efforts de conservation sont en place pour préserver l’intégrité génétique d’Apis mellifera mellifera. Les organisations et les programmes de sélection visent à protéger et à propager des souches pures de cette sous-espèce. Un réseau de conservatoires à été mis en place, des associations de gens passionnés et motivés participent à la conservation en France (www.fedcan.org). Mais la majorité des pays où sont présentes les abeilles noires possèdent un réseau de passionnés qui entretiennent des conservatoires.

On peut citer la Société autochtone irlandaise des abeilles domestiques (NIHBS). Basé en Irlande, le NIHBS s’efforce de conserver la population indigène d’abeilles noires en soutenant la recherche, les programmes de sélection et les campagnes de sensibilisation du public. Ils encouragent les apiculteurs à adopter des pratiques favorisant la conservation des abeilles noires. On peut aussi encourager le projet B4 (Ramener les abeilles noires) : cette initiative est basée au Royaume-Uni et vise à réintroduire et à conserver la population indigène d’abeilles noires en Cornouailles et dans d’autres régions. Le projet implique des programmes de sélection, de restauration de l’habitat et une collaboration avec les communautés locales et les apiculteurs. De plus, pour isoler géographiquement les abeilles noires des autres sous-espèces, plusieurs pays européens ont désigné des régions spécifiques comme zones de réserve d’abeilles noires. Dans ces zones, les apiculteurs sont encouragés ou tenus d’entretenir des colonies d’Apis mellifera mellifera de race pure. Les exemples incluent certaines parties de la Norvège, de la France et de la Suisse.

Initiatives et Projets de Conservation

Nous avons vu les initiatives locales et nationales, mais ce ne sont pas les seules : à l’échelle européenne, il existe un projet européen de conservation des abeilles noires. Ce projet implique une collaboration entre divers pays européens pour conserver et promouvoir Apis mellifera mellifera. Il se concentre sur la création et la gestion de zones protégées, appelées « ruchers de conservation », où les abeilles noires peuvent être gardées et élevées sans risque d’hybridation.  Les programmes internationaux de conservation axés sur l’abeille noire, Apis mellifera mellifera, visent à préserver cette sous-espèce unique, vitale pour la biodiversité et la stabilité écologique. Ces programmes impliquent diverses stratégies et initiatives menées par des organisations gouvernementales, des instituts de recherche et des associations apicoles.

L’érosion de la biodiversité est un sujet mondial, la conservation de l’abeille noire est donc aussi un enjeu mondial. Des conférences internationales régulières, telles que celles organisées par la Fédération internationale des associations d’apiculteurs (Apimondia), offrent aux chercheurs, aux défenseurs de l’environnement et aux apiculteurs des plates-formes pour partager leurs connaissances et leurs stratégies de conservation d’Apis mellifera mellifera.

Les programmes d’élevage font partie de la stratégie de conservation. Les programmes de sélection sont conçus pour améliorer les caractéristiques souhaitables des populations d’abeilles noires, telles que la résistance aux maladies, la rusticité et la réduction des tendances à l’essaimage, mais attention, qui dit programme de sélection, n’est plus de la conservation, il faut être très vigilant sur ce point. Établir des programmes de sélection axés sur le maintien des traits génétiques d’Apis mellifera mellifera est comme tout programme de conservation osé et périlleux, mais nécessaire à la conservation de l’abeille noire. Utiliser des pratiques d’accouplement contrôlées pour empêcher l’hybridation avec d’autres sous-espèces, à défaut d’aire de répartitions séparées pour des fécondations naturelles. Développer des banques génétiques où le matériel génétique des abeilles noires pures peut être stocké à des fins de recherche et de sélection futures. Les techniques de cryoconservation sont utilisées pour conserver le matériel génétique en vue d’un stockage à long terme, mais il reste des progrès à faire dans ce domaine notamment.

Menaces et Solutions

Elles sont menacées comme tous les autres insectes par les insecticides, mais pas seulement. Les paramètres classiques de la disparition de la biodiversité s’appliquent aux abeilles noires. Comme les autres abeilles mellifères, Apis mellifera mellifera est confrontée à des menaces liées à la perte d’habitat, aux pesticides, aux maladies et au changement climatique. Elles peuvent être confrontées à la concurrence d’autres sous-espèces d’abeilles mellifères plus prolifiques et moins défensives, qui peuvent les surpasser dans certains environnements.

Les points clef de la conservation de l’abeille noire sont :

– Maintenir et préserver la pureté génétique d’Apis mellifera mellifera en empêchant l’hybridation avec d’autres sous-espèces et en assurant la conservation des populations de race pure.

– Protéger et restaurer les habitats naturels qui soutiennent les populations d’abeilles noires et aussi mener des recherches sur la biologie, le comportement et la santé des abeilles noires, et surveiller leurs populations et leur état de santé.

– Diffuser ces connaissances pour éduquer et sensibiliser les apiculteurs et le public sur leur conservation.

Importance des Programmes Internationaux

Les abeilles noires ne sont pas orphelines, des programmes et initiatives de conservation locaux, européens et mondiaux existent. Cependant, assurer un financement et des ressources adéquats pour les programmes de conservation est souvent un obstacle. Les programmes internationaux de conservation jouent un rôle essentiel dans la préservation de la diversité génétique et de la résilience des populations d’abeilles mellifères. En se concentrant sur Apis mellifera mellifera, ces initiatives contribuent à garantir que cette sous-espèce unique continue de prospérer, contribuant ainsi à la stabilité écologique, à la pollinisation agricole et à la santé globale de l’environnement.

D’un point de vue apicole …

Rôle et Importance en Apiculture

Leur rôle dans l’apiculture est plutôt en régression, elles sont moins couramment élevés par les apiculteurs que les autres sous-espèces en raison de leur nature défensive et de leur tendance à essaimer. Cependant, leur résilience et leur adaptation aux climats froids en font un atout précieux pour les apiculteurs des régions nordiques. Elles produisent du miel, bien que leur rendement ne soit pas aussi élevé que celui de certaines autres sous-espèces. Le miel qu’elles produisent est souvent apprécié pour sa saveur et ses propriétés uniques, parce qu’elles sont adaptées à produire sur des miellées tardives, elles vivent dans un environnement ou les miellées de printemps sont souvent incertaines.

Soutien et Incitations pour les Apiculteurs

L’accompagnement des apiculteurs sert aussi la cause des abeilles noires. Plus l’on augmente ses connaissances sur un sujet, plus on comprend les enjeux de sa protection. On a envie de la protéger, de protéger non seulement sa simple existence, mais pas uniquement ! En effet, même si un apiculteur ne possède pas d’abeilles noires dans son cheptel, il sait que les caractères distinctifs de rusticité par exemple sont importants et pourraient lui être utiles dans un avenir proche.

Donc, fournir des ressources et un soutien aux apiculteurs qui maintiennent des colonies pures d’abeilles noires sans retombées économiques directes peut être une bonne solution. Offrir des incitations et une reconnaissance pour encourager la conservation des abeilles noires. Comme mettre en œuvre des réglementations qui protègent les habitats des abeilles noires et restreignent l’importation d’autres sous-espèces d’abeilles mellifères dans les zones de conservation.

Apis mellifera mellifera est une sous-espèce distincte et importante de l’abeille à miel occidentale, connue pour son adaptation aux climats froids, sa résistance aux maladies et ses traits génétiques uniques. Les efforts de conservation sont cruciaux pour maintenir sa pureté génétique et garantir sa contribution continue à la biodiversité et à l’apiculture.